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La communication de crise avec Christophe Lamandé

By Sébastien Taraud  21 août 2019

Encore trop souvent laissée de côté dans les entreprises, la gestion de la communication de crise s’avère pourtant capitale le jour où l’accident survient. L’avenir de l’entreprise pourra même parfois en dépendre. Christophe Lamandé, notre partenaire A2SE Conseil et grand spécialiste du sujet, nous fait partager son expérience.

Bonjour Christophe. Peux-tu nous dire quelques mots sur ton parcours ?

Après un passage aux achats internationaux pour Carrefour, poste pour lequel j’étais basé à Istanbul, j’ai travaillé sur du marketing et de la communication. Je suis passé ensuite Directeur de la communication France. Après mon expérience chez Carrefour, j’ai suis devenu DG pour le groupe de communication d’envergure internationale FCB, pour lequel j’avais été repéré pour ma connaissance du territoire autour de la Turquie.

Après beaucoup de missions freelance, toujours dans la communication mais également sur des postes de directeur de clientèle, j’ai travaillé au Sud de la Méditerranée dans des pays où personne ne voulait aller comme par exemple, le Mali au moment où l’armée française débarquait, le Burkina Faso, le Niger, le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Congo… Je ne pouvais plus fournir seul dans mes missions freelance car mes clients voulaient que je continue de travailler pour eux en direct. Je me suis donc associé avec une amie vivant en Tunisie pour monter une entreprise et répondre à leurs besoins en matière de communication.

À ce moment là, mes missions se sont concentrées en Algérie, au Maroc, en Tunisie sur de la communication de crise avec notamment l’écriture de procédures de communication de crise sur des sujets relatifs à l’accident industriel, ou bien encore sur de la prise d’otages pour d’autres pays du continent africain.

 

Peux-tu nous parler de l’évolution des pratiques, des enjeux, en matière de communication de crise ?

Tout d’abord il ne faut pas confondre « gestion de crise » qui existe depuis la nuit des temps et la « communication de crise » qui s’est accélérée avec l’émergence des réseaux sociaux. Aujourd’hui avec ces outils, chacun d’entre nous devient un média. Il y a encore quelques années, en cas d’accident sur un site industriel, une direction pouvait refouler les journalistes à l’entrée de l’entreprise en prétextant que le site était une propriété privée et qu’il n’y avait rien à déclarer.

Aujourd’hui, même un enfant en possession d’un smartphone est capable de filmer et de diffuser des images immédiatement sur les réseaux.

Du coup, même en cas d’accident techniquement bien géré, avec les bons réflexes et les bonnes procédures, celui-ci peut se transformer potentiellement en crise, à cause des 10 secondes d’images filmées par un salarié par exemple, sorties sur les réseaux sociaux puis partagées à son insu hors contexte par d’autres personnes puis par des journalistes. Et c’est l’effet « boule de neige ». Pour peu que la direction de l’entreprise tarde à prendre la parole, les journalistes vont utiliser les images des internautes comme seules sources d’information avant même la prise de parole officielle de l’entreprise inquiétée.

Dans le cadre de notre formation sur la communication de crise, nous voyons comment communiquer avec les médias, mais également les pouvoirs publics sans oublier l’interne à commencer par les syndicats.

On peut dire qu’aujourd’hui, un directeur général va faire gérer la crise par des spécialistes, des techniciens, dans le but de pouvoir se concentrer sur sa communication de crise et celle de son entreprise.

Ce qui a changé aussi, c’est qu’il n’y a plus que les grosses entreprises qui peuvent connaître un problème de com’ de crise. Cela peut toucher aussi une PME, à l’heure où tout le monde rejette la faute sur les autres. Je pense aux entreprises sous-traitantes, par exemple. Chaque entreprise doit avoir a minima, des procédures de com’ de crise en cas de problème.

 

À quel moment une entreprise doit-elle lancer une procédure de communication de crise ?

Avec les réseaux sociaux, entre le moment où l’accident arrive et le moment où doit se faire la prise de parole officielle, il doit s’écouler 2 heures, pas plus. Si l’entreprise ne fait pas de commentaires au-delà de ces 2 heures, les médias le feront à sa place avec les images ou les vidéos mises à leur disposition par les gens sur les réseaux sociaux, avec des conséquences qui ne seront plus maîtrisables.

Ce que j’essaie de transmettre lors des formations avec mes exercices, c’est qu’entre le moment où est donnée l’alerte et le moment où la cellule de crise est activée, il ne doit pas s’écouler plus d’une demie heure, une heure maximum. La cellule doit être capable dans un premier temps de donner le nombre de victimes et ensuite de faire une première déclaration avec les éléments de langage choisis. Le fait d’agir de la sorte permet de prendre en main sa communication de crise au bon moment, d’occuper le terrain médiatique tout de suite avant que n’importe qui le fasse à votre place. Lorsque vous avez plus de détails et d’éléments à communiquer, alors vous pouvez poursuivre vos déclarations vers les médias quelques heures plus tard. Il faut faire preuve d’un maximum de transparence car tout se saura de toute façon. Mieux vaut partir de ce principe. Le but n’étant pas obligatoirement de tout dire, mais d’en dire juste assez pour qu’on vous laisse tranquille.

Même si vous refusez ou que vous détestez le fait que nous ayons basculé dans un monde de médias, vous devez en tenir compte de toute façon, parce que c’est une réalité dans laquelle vous vivez vous, votre entreprise et vos collaborateurs. Il n’y a pas d’autre solution que de s’y adapter.

 

Quelle est ton approche et tes pratiques en terme de formation à la gestion de crise ?

Je fais des diagnostics, j’écris des protocoles, puis je travaille sur la com’ de crise pour finir sur une partie pratique. Le tout en tenant compte bien évidemment du profil des personnes qui sont en formation, ainsi que du pays et de l’entreprise.

Des agences de communication forment sur la communication de crise. Mais ce qui nous différencie d’elles, ce sont nos exercices pratiques en mode jeux de rôles. Ce qui fait notre vrai force, c’est qu’on ne fait pas seulement du diagnostic de la façon dont la cellule de crise fonctionne à l’instant T. Nous savons adapter parfaitement le niveau de danger de nos exercices en temps réel en fonction des personnes qui participent aux exercices. On est là pour leur apprendre quelque chose et non pas pour les laisser avec des connaissances qu’ils auraient déjà. Et tout le monde doit apprendre quelque chose quelque soit son niveau. On fait jouer toute la cartographie correspondante à la communication de crise établie. Et chaque personne jouera tous les rôles. On est sur du serious game.

Qu’appelle-ton l’inter culturel ?

L’inter culturel, c’est l’intelligence de s’adapter aux autres. C’est ma définition.

 

Pouvons-nous lier inter culturel et communication crise ? Y a-t-il un lien entre ces 2 domaines ?

Bien sûr ! De plus en plus. Car avec la mondialisation, un accident grave dans un pays a des répercussions bien au-delà des frontières de ce pays, avec pour effet par exemple de faire dégringoler le cours de l’action en bourse d’une entreprise. Prendre en compte l’inter culturel est primordial dans l’élaboration d’une communication de crise.

Prenons par exemple le scandale récent de la viande de cheval dans les lasagnes. Le scandale n’est pas arrivé par la France. C’est venu de l’Angleterre car on ne mange pas de cheval en Angletterre. Pour eux, c’est comme si en France on mangeait notre chien. Pour nous il y avait tromperie sur la marchandise dans cette affaire. Pour l’Angleterre, non seulement il y eu tromperie sur la marchandise, mais en plus d’un point intellectuel et éthique, il n’est pas possible de manger de la viande de cheval. C’est pour cette raison que cette crise a été beaucoup plus importante en Angleterre qu’en France. Dans cette affaire, il faut tenir compte de l’inter culturel dans la communication de crise.

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Si vous souhaitez mettre en place une formation sur la communication de crise au sein de votre entreprise, contactez-nous.